Pour bon nombre de Réunionnais, le 20 décembre est l’occasion d’aller « craz maloya » (danser le maloya) en souvenir des ancêtres. Certains vont aussi rendre un hommage au Père Lafosse au cimetière de Bel Air à Saint Louis.
Un petit cimetière aux tombes modestes et aux couleurs vives. Une promenade comme un voyage dans l’histoire du sud de la Réunion. Et puis, le long des allées, peu de noms sur les croix. Et pour cause, ce sont des esclaves qui reposent ici, comme des objets privés d’identité. A l’entrée, une plaque d’argile rappelle que, pendant plus de quarante ans, le Père Lafosse prêcha pour la libération des noirs depuis sa paroisse de Saint Louis.
En 1775, le jeune prêtre lazariste avait été envoyé de Paris, dans cette paroisse du Sud de l’île. Immédiatement, il nourrit des convictions abolitionnistes. A la Révolution, il prit fait et cause pour les sans-culottes et devint un fervent partisan des « Amis de l’égalité et de la liberté ».
Les propriétaires terriens le détestaient. C’est grâce au soutien du peuple et des soixante esclaves, qu’il protègeait dans sa cure, qu’il fut élu maire de Saint Louis en 1790, et ensuite, député.
Des altercations se multiplièrent dès lors entre partisans et détracteurs du Père Lafosse. Elles allaient conduire à la grande insurrection du Sud en Mars 1798. Pendant un mois, Lafosse, Belleville et leurs hommes tinrent tête, avant de déposer les armes.
Parmi les insurgés arrêtés et condamnés à l’exil aux Indes, le père Lafosse. Il n’y alla jamais, s’arrêtant aux Seychelles avant de rejoindre la France et de rentrer à Saint Louis en 1802.
Il reprit son combat pour l’abolition de l’esclavage. Il fut assassiné non loin de l’usine sucrière du Gol quinze ans plus tard. La légende dit que les esclaves auraient alors enterré son corps dans le cimetière abandonné où ils enterraient plus ou moins secrètement les leurs.
Aujourd’hui, la tombe du Père Lafosse est devenue un lieu chargé de l’Histoire de l’Esclavage, fleurie toute l’année et plus particulièrement à l’occasion de la Toussaint et pour le 20 décembre.